Le 10 septembre à l’appel de collectifs locaux, des centaines de personnes ont manifesté à Douarnenez, Vannes, Concarneau et Lannion pour demander à ce la Bretagne soit classée en « zone tendue » afin que les collectivités puissent mieux intervenir pour réguler le marché immobilier.
« Le phénomène n’est pas nouveau mais il prend des proportions inquiétantes, en particulier avec le développement des locations de courte durée par des plateformes » s’alarme Florence Crom, élue d’opposition à Douarnenez. « Déjà pour les Municipales de 2020 et les Départementales de 2021, de nombreuses personnes, sur les marchés ou en porte à porte nous avaient alerté sur les difficultés à se loger à Douarnenez. » Des entreprises commencent à avoir de plus en plus de mal à recruter au point d’envisager de s’installer ailleurs.
Le classement de la Bretagne en « zone tendue » donnerait aux élus des outils pour réguler le marché de l’immobilier. Or, le décret du 10 mai 2013 n’a retenu aucune commune de la Bretagne administrative en « zone tendue ».
La loi ALUR de 2014 et la loi ELAN de 2018 créent des zones dites « tendues » pour les villes répondant à certains critères : Il s’agit de zones d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants où existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements entraînant des difficultés sérieuses d’accès au logement sur l’ensemble du parc résidentiel existant. Ces difficultés se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers, le niveau élevé des prix d’acquisition des logements anciens ou le nombre élevé de demandes de logement par rapport au nombre d’emménagements annuels dans le parc locatif social ». Ce dispositif permet ou impose aux communautés de communes plusieurs mesures. Tout d’abord, la mise en place obligatoire d’observatoires des loyers qui sont chargés d’assurer une veille sur l’évolution de l’immobilier, des loyers, de la construction, du taux de tension dans le parc public, ou du taux d’effort des ménages.
Ensuite, les collectivités en zone tendue peuvent encadrer ou plafonner les loyers lors de la relocation des logements.
Pour le marché des meublés de tourisme, les mairies peuvent instaurer une procédure d’enregistrement, et limiter le nombre annuel de nuitées.
D’un point de vue fiscal, les mairies peuvent aussi majorer la taxe d’habitation sur les résidences secondaires.
« Nous sommes bien conscient du problème et nous savons qu’une partie de la solution est entre les mains des collectivités locales, à condition que l’Etat leur donne les moyens d’agir » confirme Patricia Salaun-Kerhornou. C’est d’ailleurs pour cette raison que Brest Métropole est devenue la première collectivité « autorité organisatrice de l’habitat » et que nous sommes partie prenante
Toutes les collectivités ne rencontrent pas les mêmes difficultés en matière de logements. Les enjeux ne sont pas les mêmes dans les villes universitaires ou dans les stations balnéaires. « C’est précisément pour cette raison que nous devons jouer collectif et que l’Etat doit mettre à la disposition des collectivités des outils adaptés pour répondre aux problématiques qu’elles rencontrent » insiste Patricia Salaun-Kerhornou.
Les élus et les collectifs bretons seront-ils entendu ? Rien n’est moins sûr. Il suffit pour s’en convaincre d’écouter la réponse du ministre du logement à une question posée par le député de la majorité présidentielle Eric Bothorel, en Commission des affaires économiques le 13 septembre. « Je ne vais pas vous donner une réponse définitive aujourd’hui mais je peux vous assurer qu’on y travaille ». Bref, pour le gouvernement, il est urgent d’attendre et d’autres mobilisations comme celles du 10 septembre seront certainement nécessaire pour que la Bretagne soit, enfin, classée en « zone tendue ».
Tout va bien à Douarnenez ?
« Le problème du logement ne concerne pas que Douarnenez, c’est comme ça partout, à Concarneau, à Landerneau etc… Ici, on a des associations qui agite le drapeau rouge mais le problème n’est pas que chez nous. » Cette réflexion de la maire de Douarnenez, Jocelyne Poitevin, rapportée par le Télégramme a piqué au vif les élu-es d’opposition du groupe terre citoyenne qui lui ont immédiatement publié un communiqué.
« Quel mépris pour toutes celles et tous ceux qui témoignent régulièrement dans la presse et sur les réseaux sociaux pour dire leurs difficultés à accéder au logement dans notre ville. Quel dédain pour les citoyens et les citoyennes qui se bougent, de manière désintéressée, pour sensibiliser sur la crise du logement et qu’elle qualifie d’agitateurs ».
Mais le groupe a surtout pointé les incohérences de la maire de Douarnenez. En effet, celle-ci note que le logement n’est pas une compétence municipale mais intercommunale. Or, qui est en charge de l’urbanisme à Douarnenez communauté ? Jocelyne Poitevin. La maire de Douarnenez pourrait aussi solliciter le vice-président en charge du logement au département. Ça ne devrait pas être trop difficile pour elle puisqu’il se trouve qu’elle est également vice-présidente du Conseil départemental.
Article publié dans le Cap Finistère n°1405 du 23 septembre 2022
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