Comment répondre à la crise du bénévolat
« Une mine d’or ». Voilà comment a été décrit le mouvement associatif au cours de l’échange organisé au Campus2022 avec Pascal Brice, président de la FAS (Fédération des acteurs de la solidarité). Toute la question qui se pose, aujourd’hui, tant aux dirigeants associatifs qu’aux responsables politiques est : comment faire fructifier cette mine d’or alors même que la plupart des indicateurs passent au rouge.
Partis, syndicats ou associations connaissent, à des degrés divers, les mêmes difficultés de recrutements d’adhérents. Pour Pascal Brice, cependant, on ne peut pas les placer sur le même plan puisque les partis ont vocation à exercer le pouvoir, à chaque échelon électoral. Malgré cette spécificité, partis, syndicats et associations partagent la même responsabilité fondamentale : dans la situation incandescente et par bien des aspects inquiétante que connait notre pays, ils doivent toujours porter une parole de transformation et surtout d’apaisement.
Parmi les éléments qui expliquent la crise que traverse le monde associatif, il y a bien sur la pandémie qui a réduit les activités associatives pendant presque deux ans, mais aussi, la suppression des emplois-aidés. Certaines associations ne s’en sont pas remises.
C’est un fait que tous les responsables associatifs peuvent constater : l’âge moyen des bénévoles a tendance à augmenter. « C’est vrai dans les associations implantées, qui ont une histoire » reconnait Pascal Brice. « Mais à côté de ces associations installées, on voit partout fleurir des collectifs, animés par des jeunes qui veulent agir. Tout l’enjeu consiste à revitaliser le monde associatif avec cet apport et ce regard nouveau en particulier sur les enjeux écologiques ou les rapports sociaux. Il faut s’ouvrir à de nouvelles formes d’engagements, voir qu’il y a d’autres façons de faire ».
Le mouvement associatif, notamment dans le domaine social, joue un rôle fondamental. Et le président de la FAS s’est lancé dans un vibrant plaidoyer en faveur des travailleurs sociaux. « Il n’y a plus de jeunes dans les écoles de travail social » a déploré Pascal Brice. « Or, on vit un moment d’enracinement de la pauvreté dans un pays riche qui a peur de tout, de toutes les formes de violences. Il y a des addictions, des inégalités sociales, des radicalités. Tout fait peur, parfois pour de bonnes raisons mais aussi parce qu’elles sont fantasmées ». Et c’est précisément dans ce moment, qu’on se prive des travailleurs sociaux. Pour Pascal Brice, « ce phénomène met en exergue le problème fondamental de notre société : plus vous êtes utile socialement, moins vous êtes reconnu. » Il faut donc trouver les moyens de faire en sorte que les travailleurs sociaux, indispensables, soient reconnus à leur juste valeur.
« On sent une angoisse lancinante dans les interventions : la crise de l’engagement » a résumé Tristan Foveau, co-animateur de cet échange. « Je ne pense pas qu’il y a une fracture générationnelle sur le plan de l’engagement. Il n’y a pas, d’un côté, les vieux qui continuent à s’engager, et de l’autre les jeunes qui sont tombés dans l’individualisme extrême. Je crois, en revanche, que les formes d’engagement ont profondément évolué ». Les jeunes étudiants à qui il donne des cours ne sont pas militants dans des partis. Et pourtant, ils sont tous présents sur les réseaux sociaux, suivent des comptes politiques, souvent les plus visibles et les plus bruyants. « La question qui se pose aujourd’hui est : « y a-t-il encore un engagement totalement gratuit ? Peut-être que l’individualisme a fait progresser une forme de sentiment qu’un engagement doit avoir un débouché d’une façon ou d’une autre. Il faut donc répondre à la question : comment on valorise cet engagement. Dans des pays voisins comme l’Allemagne, le syndicalisme offre des débouchés parce qu’ils ont opté pour un syndicalisme de service. Le PS doit donc réfléchir aux débouchés qu’il offre à ses nouveaux adhérents pour leur donner l’envie de rester. »
Un acteur majeur de la solidarité.
La FAS (Fédération des acteurs de la solidarité) est un réseau généraliste de lutte contre les exclusions. Elle regroupe plus de 870 associations et organismes qui agissent pour la solidarité.
Ces structures représentent environ 2800 établissements et services qui représentent notamment 90 % des centres d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), un grand nombre d’accueil de jour et de logements pour les plus précaires, la majorité des places d’accueil pour demandeurs d’asile et réfugiés et plus de 500 structures d’insertion par l’activité économique.
Les adhérents de la Fédération assurent des missions d’accueil, d’accompagnement et d’insertion des personnes en précarité, avec une approche globale de la personne, en traitant les multiples problématiques liées à l’exclusion : hébergement et logement, santé, insertion et emploi, accès aux droits, accès à la culture, lien social… Ils gèrent aussi en propre directement des places d’hébergements, des logements, des services de soins et des activités d’économie sociale et solidaire avec réalisées par des salariés en insertion (maraîchage biologique, ressourceries, garages solidaires, services à la personne etc).
La Fédération a été créée en 1956, depuis elle est composée d’une tête de réseau et de 13 Fédérations régionales indépendantes.
Article publié dans le Cap Finistère n°1403 du 9 septembre 2022
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