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mercredi 25 décembre
Inventer la démocratie du XXIe siècle

La Bretagne laboratoire de l’innovation démocratique ? C’est l’ambition affichée des Socialistes bretons. Mais pour y parvenir, encore faut-il bien mesurer de quelle manière les Bretonnes et les Bretons souhaitent participer à la vie démocratique. 

Pour présenter les enjeux, le BREIS a organisé le 12 mars un webinaire auquel participaient Chloé Morin, experte de l’opinion, Claudy Lebreton, ancien président de la FNESR et Olivier Rouquan, universitaire. 

 

Nous sommes face à un paradoxe : les citoyens demandent de plus en plus à être écoutés et associés aux décisions politiques mais, lorsque des consultations sont organisées, la participation est très faible. 

Pour Chloé Morin, ce paradoxe s’explique par la défiance à l’égard des institutions qui se traduit par un discours consistant à exprimer la volonté de « faire à la place des dirigeants ». Mais les citoyens sont tout à fait conscients de la complexité des dossiers et s’accommodent assez bien de la démocratie représentative. 

Les résultats de la conférence citoyenne pour le climat ne vont pas contribuer à redonner confiance aux citoyens. La sélection du panel de 150 personnes tirées au sort par un institut de sondage semble avoir été faite sérieusement, même s’il n’est pas encore possible de savoir exactement comment ce choix a été opéré. Mais surtout, les règles du jeu ont été modifiées au cours des discussions. Au départ, le président de la République avait indiqué qu’il accepterait « sans filtre » les propositions. Or, le projet de loi ne reprend que partiellement les conclusions de la convention citoyenne. 

Cependant, dès le début, cette issue était prévisible. En effet, cette convention citoyenne n’a pas été imaginée pour apporter des solutions à la crise climatique mais pour permettre au gouvernement de se sortir du bourbier de la crise des gilets jaunes dans lequel il s’était lui-même enfoncé. En outre, chacun comprend bien que l’élaboration d’une loi relève du Parlement et non d’une assemblée composée de citoyens tirés au sort. 

Il est possible de tirer des leçons de ces erreurs pour ne pas retomber dans les mêmes travers. 

La première des questions qu’il faut se poser est : une convention pour quoi faire ? Pour recueillir un avis ? Pour faire émerger des propositions originales et innovantes ? Pour ratifier et acter des décisions déjà prises ? 

Pour Olivier Rouquan, il faut bien distinguer comment les citoyens peuvent intervenir en précisant ce qui relève de la simple consultation, de la concertation et de la co-construction. Et il convient de trouver d’autres termes pour définir ces nouvelles formes de prises de décisions. En effet, « démocratie participative » est un pléonasme. Mieux vaut parler de « démocratie ascendante ». Et surtout, elle ne doit pas l’opposer à la « démocratie représentative ». Au contraire, elles doivent se renforcer et s’améliorer. Or, le risque est grand, si on donne trop de pouvoir à des assemblées tirées au sort, de favoriser encore l’abstention et donc d’aggraver un cercle vicieux. 

Pour Olivier Rouquan, l’enjeu consiste à recueillir la parole et les avis des personnes les plus éloignées de la délibération démocratique, celles et ceux qui ne votent plus. 

Pour Claudy Lebreton, il faut aussi relever le défi la démocratie sociale et surtout préserver la vitalité du tissu associatif, particulièrement dense en Bretagne. D’une manière générale, ce sont tous les corps intermédiaires qui doivent être soutenus. « L’innovation démocratique demande des investissements conséquents », a insisté Claudy Lebreton. Ce n’est qu’au bout de plusieurs années qu’on peut mesurer leur pertinence. 

Le plus souvent sous l’impulsion de la gauche, de nombreuses procédures de consultation ont été rendues obligatoires. Mais il ne faut absolument pas que les élus, tant les conseillers régionaux que départementaux ou municipaux, les considèrent comme des opportunités, des moyens d’améliorer leurs projets et non comme des contraintes dans l’élaboration de leurs politiques. C’est en réalisant cette révolution culturelle que la Bretagne pourra devenir le laboratoire de l’innovation démocratique. 

 

Article publié dans le Cap Finistère n°1348 du 26 mars 2021




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