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mercredi 25 décembre
La force (possible) du Parlement

L’effacement du Parlement n’est pas une fatalité. L’association La loi pour tous, tous pour la loi, fondée en 2017 par Dominique Raimbourg, ancien député de Loire Atlantique, et Phillipe Quéré, assistant parlementaire, tente de le démontrer. Elle s’est fixée pour objectif de promouvoir la connaissance du fonctionnement quotidien des institutions de la République et en premier lieu du Parlement, de contribuer au développement d’une culture démocratique et d’encourager et d’accompagner la participation citoyenne.
Elle vient, en collaboration avec l’OURS (Office Universitaire de Recherche Socialiste), le Think tank L’Hétairie et la Fondation Jean-Jaurès, de publier un recueil de contributions rédigées par des parlementaires, des ministres, des universitaires ou des collaborateurs parlementaires qui font part de leurs expériences ou de leurs travaux.
Il en ressort, malheureusement, que ce quinquennat aura scrupuleusement sapé notre édifice démocratique.
Parmi les contributions publiées dans cet ouvrage, celle de Jean-Jacques Urvoas, intitulée « Les bâtisseurs de ruines » dresse un bilan bien sombre du rôle joué par le groupe majoritaire à l’assemblée pour affaiblir le rôle du Parlement.
Loin d’avoir cherché à revendiquer une quelconque “ force possible du Parlement ”, l’Assemblée nationale de cette 15e législature restera comme une expérience méthodologique qui lui permis de disparaître en appliquant scrupuleusement cinq préceptes.
D’abord, ce qui est tout de même paradoxal pour des parlementaires, les députés du groupe majoritaire ont abdiqué toute prétention législative. En effet, l’article 11 de la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 autorisait le gouvernement à prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi afin de faire face aux conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de Covid-19 et aux conséquences des mesures prises pour limiter cette programmation.
« Si l’exercice est parfaitement respectueux de l’article 38 de la constitution, il n’en demeure pas moins qu’une telle délégation confiée au pouvoir gouvernemental, par son ampleur, s’éloigne à bien des égards des habilitations plus classiques en temps normal sous la Ve République. »
Ensuite, ils ont privilégié l’accessoire devant l’essentiel. À aucun moment la commission des affaires sociales n’a cherché à auditionner la ministre de la Santé, en responsabilité au début de la pandémie.
Bien que cette mission figure leurs prérogatives, les députés de la majorité présidentielle se sont contentés d’un contrôle minimaliste.
L’opposition n’a jamais été autant muselée. Autant les députés LREM ne semblent pas savoir comment contrôler l’exécutif, autant, ils maîtrisent parfaitement la procédure parlementaire lorsqu’il s’agit d’empêcher l’opposition de jouer son rôle de contrôle et de propositions. Pour éviter la création d’une commission d’enquête, une mission d’information a été mise en place. Or, il n’est pas possible qu’une commission d’enquête intervienne sur une question traitée par une mission d’information.
Et enfin, la majorité présidentielle a pu s’appuyer sur le Conseil d’État et le Conseil constitutionnel.
« Ainsi donc, en quelques mois, au cœur d’une crise sanitaire sans précédent, l’Assemblée nationale s’est volontairement éteinte », conclut Jean-Jacques Urvoas. « Là où la Chambre des députés, durant la grande guerre de 1914-1918, avait démontré l’utilité d’un parlementarisme de guerre en assurant “l’unité morale et matérielle de la nation”, en sortant peu à peu du rôle que l’exécutif avait imaginé pour elle, la majorité de la 15e législature a réduit la représentation nationale au simple rang de spectatrice docile de l’action gouvernementale. »
C’est, bien sûr, « à la fin de la foire qu’on compte les bourses » et la 15e législature n’est pas encore terminée. Sauf que chacun sait qu’il ne se passera plus grand chose à l’Assemblée nationale, d’ici les élections de juin 2022. Les députés LREM sont obsédés par cette échéance et ne veulent surtout pas attirer l’attention de peur de ne pas recevoir la précieuse investiture.

Article publié dans le Cap Finistère n°1365 du 10 septembre 2021




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