A Berlin, où il tenait son congrès au mois d’octobre, le Parti des Socialistes Européens (PSE) s’est doté d’une nouvelle direction, bien décidée à engager la bataille pour devenir la première force politique européenne, nous explique Christophe Clergeau, secrétaire national du PS chargé de l’Europe et membre de la présidence du PSE.
Cap Finistère : Que représente le PSE aujourd’hui, en termes d’adhérent-es et d’élu-es ?
Christophe Clergeau : Nous sommes la plus grande force politique européenne à gauche. Au congrès de Berlin, par exemple, on comptait autour de la table des leaders, 7 premiers ministres de l’Union européenne et 2 premiers ministres de pays candidats à l’adhésion.
Le PSE compte des centaines de milliers d’adhérents sur l’ensemble du continent. Les Socialistes sont la seule force politique qui maille l’ensemble de l’Union européenne.
Avec 145 député-es, le groupe S&D est le deuxième du parlement européen ce qui permet à ses élu-es d’exercer des responsabilités majeures tout comme au sein de la Commission européenne.
Cap Finistère : Qui est Stefan Löfven, élu nouveau président du PSE ?
Christophe Clergeau : Il résume bien ce qu’est aujourd’hui le socialisme européen : Il est un ancien leader syndical, un ancien dirigeant du Parti social-démocrate suédois et, il y a un encore un an, il était premier ministre. On a donc la chance d’avoir à la tête du PSE une personnalité politique de 1er plan. Il est ancré dans les combats sociaux. Il a aussi l’expérience de l’animation d’un grand parti, et j’espère qu’il parviendra à apporter cette dimension militante au PSE, qui est, pour l’instant, surtout un espace de coopération entre les partis. Il est temps qu’il devienne véritablement un parti d’adhérents.
Et enfin, et c’est je crois un atout déterminant, il peut discuter d’égal à égal avec l’ensemble des responsables socialistes européens et les entraîner pour préparer les futures échéances électorales.
Cap Finistère : Le PSE a donc les prochaines élections européennes en ligne de mire ?
Christophe Clergeau : Oui, et d’autant plus que nous pouvons les gagner. Si on se donne la peine de prendre un peu de hauteur, on constate que les Libéraux sont, de manière générale, à la peine, que la droite, quasi partout, se compromet et passe des accords avec l’extrême-droite et que les sociaux-démocrates remportent des victoires, comme en Allemagne ou au Danemark. Et lorsqu’ils perdent le pouvoir, comme en Suède, ils restent puissants et en progrès.
Avec Stefan Löfven, on peut espérer que la dimension collective l’emportera et qu’on n’assistera pas à une addition de campagnes dans chaque pays mais à une démarche vraiment collective au service d’un projet de gauche européen et d’une ambition partagée.
Cap Finistère : Justement, sur quoi ont porté les débats au congrès de Berlin ?
Christophe Clergeau : D‘abord, parce qu’il s’est tenu dans la capitale allemande, en présence de Olaf Scholz, il y avait un climat déterminé et ambitieux qui tranchait un peu par rapport aux congrès précédents.
Le PSE est un parti qui débat, qui prend la mesure des crises qui ont secoué et qui secouent l’Europe : la crise financière de 2008 et ses suites, la crise sanitaire du covid, la crise environnementale, qui s’est traduite, cet été, par des incendies ou des inondations et la guerre en Ukraine. Face à la gravité de ces crises nos débats ont pris de la hauteur et connu un nouveau souffle. La question que chacun se pose est : qu’est-ce que les Socialistes peuvent apporter au nouveau projet collectif des Européens ? Les Socialistes veulent évidemment défendre la démocratie et les valeurs européennes, mais ils veulent aussi inventer un nouveau modèle de vie et de développement qui combine le combat pour l’égalité et la justice sociale mais aussi le combat pour la planète et pour la justice climatique.
On a clairement senti, au fil des interventions, que les Socialistes européens prennent leurs distances par rapport aux idées sociales-libérales défendues, il y a encore quelques années, par des dirigeants comme Tony Blair. Ils ont retrouvé une forme de radicalité au sens de volonté de transformation, de changement de modèle, tout en restant attaché à la capacité à agir et au sérieux dans l’exercice du pouvoir.
Quand on voit les délégués remettre en cause la libéralisation du marché de l’énergie, le pacte de stabilité ou la politique de concurrence, on voit bien que chacun a compris qu’il fallait faire du neuf.
Les crises auxquelles nous sommes confrontés justifient qu’on renoue avec une tradition forte de soutien aux plus défavorisés, de promotion des services publics, d’intervention de la puissance publique. A Berlin, les Socialistes ont repris les débats à leurs racines et se sont reposé les questions fondamentales en s’appuyant sur leur histoire et sur leurs valeurs.
J’ajoute qu’on sentait à Berlin une vraie envie de gagner, tout simplement parce que face aux compromissions entre la droite et l’extrême-droite, la seule force capable d’assumer un projet d’avenir pour l’Europe, ce sont les Socialistes et certainement pas les Libéraux.
Article publié dans le Cap Finistère n°1413 du 25 novembre 2022
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