Les HLM : un modèle français menacé
C’est le « modèle français » du logement social qui est menacé par la politique menée depuis 2017. Le 80e congrès de l’Union Sociale pour l’Habitat (USH), qui s’est tenu les 24 et 26 septembre à Paris, a fortement rappelé les inquiétudes des professionnels de ce secteur.
L’USH représente 660 opérateurs HLM à travers cinq fédérations. Elle remplit trois missions : un rôle de représentation nationale auprès des pouvoirs publics, une mission de réflexion, d’analyse et d’étude et, enfin, une fonction d’information, de conseil et d’assistance auprès des organismes HLM. C’est dire si son congrès annuel est un moment important et un lieu privilégié pour comprendre les enjeux de la politique du logement.
La question du financement du logement social y a été largement abordée. « La financiarisation du modèle économique des organismes HLM, mise en oeuvre par le gouvernement n’est qu’une tentative de privatisation qui ne dit pas son nom et dont les classes populaires et moyennes seront les premières victimes », a dénoncé le Parti Socialiste.
« Les acteurs du logement social sont inquiets. »
« Sacrifier les logements sociaux sur l’autel d’économies de bouts de chandelle nous affaiblit et nous appauvrit collectivement. Au contraire, ayons le courage de conforter le modèle français qui est au croisement des enjeux de pouvoir d’achat, de transition écologique et de développement économique. »
« Attendre d’acteurs privés qu’ils se mobilisent sur le logement social est un leurre : ces acteurs ont des objectifs de rentabilité incompatibles avec nos objectifs sociaux », insiste Jean-Paul Vermot, président de Finistère Habitat.
L’USH a réaffirmé, à l’issue de son congrès, qu’elle continue de défendre l’application d’un taux réduit de TVA à l’ensemble de la production et de la réhabilitation de logements sociaux, en location comme en accession.
Les aides aux personnes aussi mettent à mal le modèle français. « Désormais, ce sont les locataires des HLM qui financent eux-mêmes la compensation des APL. Là où nous avions un système de solidarité où la nation se mobilisait pour le logement social, la fin du versement des APL dans les HLM crée un système inacceptable dans lequel les locataires HLM financent leur propre solidarité », s’indigne Jean- Paul Vermot. Et la perspective de voir les APL fondues dans RUA, comme l’envisage le gouvernement, ne manque pas d’inquiéter l’USH (voir encadré).
À quelques mois des élections municipales, l’Union Sociale pour l’Habitat appelle tous les candidats aux élections municipales à faire du logement social un thème positif. Le logement social est trop souvent caricaturé par une partie des candidats, notamment face à des maires bâtisseurs, dans le cadre de ces élections, alors même que les besoins de la population devraient être, plutôt que les craintes, les véritables curseurs d’un débat public responsable.
Attention au financement du RUA
Les discussions autour du RUA (Revenu Universel d’Activité) ne manquent pas d’inquiéter les professionnels du logement. « S’il est universel c’est comme les allocations familiales, il s’adresse à tout le monde. Il ne peut pas être d’activité. Ou c’est un revenu d’activité ou c’est un revenu universel donc il y a une contradiction, dès le départ, dans les termes ce qui n’est pas encourageant pour la suite de la discussion. »
Les APL ont été créées en 1977, pour les locataires HLM. En 1990, pour tout le monde et depuis 2018 le gouvernement est en train de dire, on en met trop pour les logements HLM c’est pas normal. « Ce n’est pas normal qu’on pique de l’argent aux organismes HLM, donc sur les loyers des locataires pour financer les APL », s’est indigné Marcel Rogemont au 80e congrès des HLM.
Sur le RUA : on mélange trois éléments qui ont des financements et des objectifs différents : d’abord le RSA. On peut envisager de réunir les minima sociaux. « J’ai moi-même participé à la rédaction d’un rapport, avec Christophe Sirugue, pour réunir les onze minima sociaux qui existent. Oui on peut simplifier. »
La prime pour l’emploi quand elle est un import négatif. Il n’est en effet pas normal qu’il n’y ait que ceux qui payent l’impôt sur le revenu qui puissent avoir des diminutions d’impôts. Les ménages modestes peuvent aussi avoir des diminutions d’impôt, c’est ça l’effet distributif de l’impôt sur le revenu. Ce n’est donc pas la même chose qu’un minima social.
Et enfin, les APL n’ont absolument rien à voir avec un minima social. L’un est financé par les départements et l’autre par la fiscalité et le troisième par la CAF. Il n’y a pas de non recours pour les APL alors qu’il y en a pour au moins 6 milliards pour le RSA et les autres minima sociaux. Donc qui va payer les milliards de non recours ? Ça sera les APL. Marcel Rogemont demande au gouvernement combien de personnes qui touchent les APL n’en toucheront plus. Et quel sera le montant pour celles et ceux qui continueront à la toucher ? Si le gouvernement ne répond pas à ces questions ça voudra dire qu’il veut faire des « économies sur le dos des ménages qui touchent les APL ».
Article publié dans le Cap Finistère n°1283 du 4 octobre 2019