La quête des parrainages a été utilisée par plusieurs candidats à la présidentielle pour se victimiser et apparaitre comme hors d’un système qu’ils prétendent combattre. « Mais, comme les observateurs politiques ont une mémoire de poisson rouge, personne n’a rappelé qu’il en va de même à chaque présidentielle » souligne Jean-Jacques Urvoas qui note que 12 candidats sont aujourd’hui en lice alors qu’ils n’étaient que 11 en 2017.
Pour peu qu’ils s’en donnent les moyens, et qu’ils ne se présentent pas trop tard, comme Christiane Taubira, le filtre des parrainages n’est pas un obstacle insurmontable lorsque les candidats sont un peu organisés.
Une fois posé ce préalable, l’analyse de la liste des signataires peut se révéler riche d’enseignements sur l’état des forces politiques.
Que nous enseigne la liste des parrainages dans le Finistère ? D’abord que le nombre de parrains a sensiblement baissé depuis la dernière présidentielle puisqu’on en compte 105 cette année contre 122 en 2017.
Ensuite, si on regarde qui parraine, on trouve 49 maires, 25 conseillers départementaux, 15 conseillers régionaux et 12 parlementaires
Mais si on rapporte ces chiffres au nombre de signataires potentiels, on voit que tous les élu-es ne se mobilisent pas de la même manière. Les parlementaires remportent la palme de la participation puisque les 12 députés et sénateurs ont parrainé un candidat : 10 pour Emmanuel Macron, 1 pour Anne Hidalgo et 1 pour Valérie Pécresse.
Viennent ensuite les conseillers régionaux avec 60% de parrainages. A noter que, curieusement, Valérie Pécresse ne recueille aucun parrainage du conseil régional alors que le groupe de droite compte tout de même quelques élu-es dans le Finistère.
53% des conseillers départementaux ont parrainé un ou une candidate et seuls 17,6% des maires ont apporté leur parrainage. Souvent élus sur des listes d’entente communale, la plupart des maires n’ont pas voulu apparaitre comme soutien d’un ou d’une canditate.
Quels candidats ont été parrainés ? Anne Hidalgo arrive en tête avec 27 parrainages suivie par Emmanuel Macron (20) et Valérie Pécresse (17). Viennent ensuite Philippe Poutou (9), Yannick Jadot (8) et Fabien Roussel (7).
A noter que les candidats d’extrême-droite n’ont reçu que 4 parrainages confirmant ainsi sa faible influence parmi les élus locaux.
Si on regarde dans les détails qui parraine qui, on constate qu’Anne Hidalgo est parrainée par l’ensemble des élus avec 13 maires, 10 conseillers départementaux, 3 conseillers régionaux et un parlementaire.
Emmanuel Macron, quant à lui, est surtout parrainé par les parlementaires qui représentent 50% de ses signataires. S’y ajoutent 6 maires, 2 conseillers départementaux et 2 conseillers régionaux. Ce faible score montre que LREM n’a pas élargi sa base parmi les élus locaux depuis 2017 alors qu’à l’époque, il avait reçu le parrainage de 16 maires du Finistère.
Si on regarde les dates des parrainages, on constate qu’à la mi-février, la quasi-totalité de ses parrains avaient adressé leur formulaire au Conseil Constitutionnel. Comme si les députés en place avaient eu besoin, très rapidement, de ne surtout laisser planer aucun doute sur leur soutien au président sortant. Ces envois, très tôt, des parrainages s’inscrivaient aussi dans une stratégie de campagne bien orchestrée alors qu’Emmanuel Macron n’était pas encore officiellement candidat.
Valérie Pécresse a surtout été parrainée par des conseillers départementaux (10). Suivent ensuite les maires (6), un parlementaire et aucun conseiller régional. La faible mobilisation des maires de droite pour la candidate de leur parti est plutôt étonnante.
Le filtre que représente les parrainages par les maires n’est absolument pas un obstacle pour les candidats qui souhaitent se présenter à la présidentielle, d’autant que les règles sont connues depuis des années. Passée l’émotion du moment, il y a fort à parier qu’elles ne seront pas modifiées. Et dans 5 ans, la campagne présidentielle commencera encore par ce psychodrame et des candidats utiliseront encore ce passage obligé pour faire parler d’eux.
Avec 27 parrainages, Anne Hidalgo arrive en tête dans le Finistère
65 candidats ?
Interrogé sur cette question par les étudiants en droit de l’UBO, Laurent Fabius a rappelé que le nombre de parrains avait d’abord été fixé à 100, puis à 500, sans publicité, puis de manière totalement transparente. Cette évolution a-t-elle eu une influence sur le nombre de candidats ? Absolument pas puisque nous sommes passés de 10 candidats en 2002, à 10 en 2007, 11 en 2017 et donc 12 cette année.
Les polémiques sur le caractère anti démocratique du système sont tout de même très artificielles. « Sans le filtre de ces parrainages, il y aurait 65 candidates et candidats, puisque c’est le nombre de personnes qui ont reçu un parrainage. Je ne suis pas certain qu’on puisse organiser une élection avec autant de candidats ni que les débats puissent être sérieux ».
Article publié dans le cap Finistère n°1387 du 25 mars 2022
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