Pas de confinement pour la solidarité
Pendant le confinement, dans le Finistère, le Secours Populaire a poursuivi ses actions même si l’association a enregistré une forte baisse de ses recettes, nous explique son secrétaire général départemental, Thierry Cloâtre
Cap Finistère : Comment avez-vous traversé le confinement ?
Thierry Cloâtre : Lorsque le confinement a été annoncé, nous ne nous sommes pas demandés si nous devions poursuivre ou arrêter notre action mais comment la poursuivre d’autant que nous avons dû, très rapidement, répondre à des demandes d’aide alimentaire. Durant les deux mois du confinement, nous avons distribué 300 000 repas sur l’ensemble du département de plus, soit une hausse de 40 % par rapport à l’année dernière à la même période.
Nous nous sommes beaucoup servis du téléphone pour maintenir les liens avec les familles ou avec nos donateurs. Il nous semblait vraiment important de ne pas perdre le lien et les retours que nous avons eu nous renforcent dans cette conviction. C’est dans des moments comme celui-ci qu’il faut absolument garder les contacts. Tout ce qui est humain est nôtre et ça passe bien sûr par ce genre de contacts qui évitent l’isolement. Nos permanences juridiques se sont faites également par téléphone.
Certains groupes ont accompagné et aidé des élèves en ligne qui rencontraient des difficultés pour l’école à domicile.
Malheureusement, nous avons été obligés d’interrompre nos cours de FLE (Français Langue Étrangère) à Brest et à Châteauneuf du Faou, car il n’était pas possible de le faire à distance.
Cap Finistère : Certaines inégalités se sont-elles accentuées ?
Thierry Cloâtre : Il existe toute une partie de la population qui ne parvient à survivre qu’en effectuant des petits boulots : des ménages, des gardes d’enfants, des distributions de prospectus dans les boîtes aux lettres. Les étudiants ne pouvaient plus se rendre au RU. Dès que ces activités ont été rendues impossibles, ces personnes, que nous ne connaissions pas, ont été obligées de se tourner vers l’un de nos 18 comités pour pouvoir se nourrir. Il n’y a pas de honte à avoir besoin d’un coup de main or, nous constatons trop souvent que des personnes attendent le dernier moment pour nous solliciter. Il n’est bien sûr jamais trop tard, mais parfois, un coup de main précoce permet d’éviter des situations plus graves.
Cap Finistère : Quels sont vos projets ?
Thierry Cloâtre : L’été arrive et nous allons, comme de coutume, organiser des sorties pour les familles qui ne peuvent pas partir en vacances. Nous ne savons pas encore exactement comment nous allons faire mais nous trouverons des solutions. Car, cette année, peut-être même plus que d’habitude, il est vraiment important que les familles puissent se retrouver et se changer les idées.
Comme je l’ai dit, certaines familles ont rencontré des difficultés avec l’école à la maison. À la rentrée, nous allons mettre en place du soutien scolaire. Il faut tout de même noter que les écoles ont été les premiers lieux fermés.
Cap Finistère : Le confinement vous a empêché de mener de nombreuses opérations engendrant un manque à gagner important. Qu’attendez-vous des pouvoirs publics ?
Thierry Cloâtre : C’est tout notre modèle économique qui a été remis en cause. En effet, nos recettes proviennent pour une grande part de nos collectes. C’est ce qui garantit notre indépendance.
Les collectes font partie de notre ADN. Nos recettes se répartissent de la façon suivante : 60 % de collectes, 30 % de dons et 20 % de subventions. Plusieurs collectivités locales nous ont attribuées des subventions exceptionnelles, mais nous savons déjà que ça ne suffira pas à retrouver l’équilibre. À ce jour nos demandes au Conseil départemental et à la Préfecture sont en cours d’instruction. Nous estimons à 400 000 euros notre manque à gagner pour la période du confinement. Nous réfléchissons donc à de nouvelles modalités de collectes ou de recueil de dons, en installant par exemple des urnes dans les entrées des magasins. Mais, par exemple, nous ne savons pas aujourd’hui comment nous pourrons mener des opérations comme les coureurs ont du coeur qui nous permettent tous les ans d’offrir des cadeaux aux enfants à Noël.
Je tiens aussi à préciser que le Fonds Européen d’Aide aux plus Démunis (FEAD) nous a été très précieux pour traverser le confinement. À chaque négociation budgétaire, certains pays tentent de remettre cette politique en question. Mais là, tout le monde a pu se rendre compte qu’il est indispensable.
Article publié dans le Cap Finistère n°1314 du 5 juin 2020