Plus de souplesse, moins de bureaucratie
Pour se faire entendre, le parti socialiste doit faire preuve d’originalité. Et surtout, il doit faire confiance à ses sections et fédérations explique Pierre Jouvet, porte-parole et secrétaire national au développement et à la structuration du parti.
Cap Finistère : A peine désigné porte-parole et secrétaire national du PS chargé du développement et de la structuration du parti, des copies de ta profession de foi aux dernières législatives où tu te présentais comme "candidat de la majorité présidentielle" fleurissaient sur les réseaux sociaux. Qu’est-ce que cela t’inspire sur la forme et sur le fonds ?
Pierre Jouvet : D’abord, sur le ton de la boutade, j’ai envie de dire que si, à peine nommé, nous sommes à ce point attaqués, c’est plutôt bon signe. Ca veut dire que certains ont peur de nous. Au point de ressortir un bout de document vieux de 18 mois.
Mais je vois bien d’où vient l’attaque. La France insoumise et certains de nos ex camarades cherchent à faire croire que le PS ne serait pas au clair dans son positionnement vis-à-vis d’Emmanuel Macron. Or, c’est totalement faux. Nous sommes résolument dans l’opposition.
Le document auquel tu fais référence n’est qu’une partie du tract que j’avais diffusé. Mais puisque j’en ai l’occasion je souhaite m’expliquer en quelques mots. D’abord, je veux rappeler qu’au moment de l’élection présidentielle, en tant qu’élu socialiste, fidèle à ma famille politique, j’ai apporté mon parrainage et j’ai voté pour Benoit Hamon au 1ertour. J’ai ensuite été le candidat du Parti Socialiste aux élections législatives de 2017 dans la 4èmecirconscription de la Drôme. Élection dont j’ai été éliminé au 1ertour, en réalisant le score de 17,2%, au détriment d’une candidate LR et d’une candidate LREM. A l’occasion cette campagne, j’ai dit et écrit que sous certaines conditions (et elles étaient nombreuses), je pourrais travailler dans la majorité présidentielle. Et plus précisément, que je pourrais être un Député de gauche dans la majorité présidentielle. Si aujourd’hui je le regrette, j’assume que comme beaucoup de français de gauche, j’ai pu être sensible aux accents progressistes du candidat Macron. J’ai cru qu’Emmanuel Macron, élu contre Marine Le Pen, ne commettrai pas la même erreur que Jacques Chirac et mènerait une politique plus sociale et plus progressiste. La politique menée depuis 18 mois est clairement libérale et tourne le dos à la promesse progressiste.
Après, je fais de la politique et je suis élu depuis suffisamment d’années pour savoir qu’il y a des risques, lorsqu’on s’expose et j’ai le cuir solide.
Enfin, je trouve assez cocasse d’être attaqué par certains qui ont quitté le PS. Moi je suis fidèle au PS, je vais me battre pour le reconstruire. Je crois que l’essentiel est là !
Cap Finistère : justement, en quoi consiste le rôle de secrétaire national au développement et à la restructuration du parti ?
Pierre Jouvet : Avant on appelait ça « secrétaire national aux fédérations » et ce n’est pas un hasard si la dénomination a changé. Quand on a porté la campagne du congrès avec Olivier Faure, nous avons mis en avant l’idée de renaissance socialiste. En effet, le parti était affaibli : la situation financière était compliquée et nous avions perdu des militants. Il fallait donc refonder notre fonctionnement et repenser notre projet de A à Z. Cette renaissance est portée par une nouvelle génération et une nouvelle équipe qui veut rompre avec le PS des 15 dernières années.
Notre parti a trop souffert de sa bureaucratie qui, de Solférino, décidait pour tout le monde. Nous devons faire plus confiance aux sections, aux fédérations ou aux élu.es locaux qui, dans les collectivités locales inventent et apportent des solutions à leurs concitoyens. Pour prendre un exemple simple, ce n’est pas à moi, militant de la Drôme, d’expliquer ce qu’il faut faire en matière de politique maritime ou d’aménagement du littoral. Nous sommes là pour accompagner.
Cap Finistère : Cette restructuration passe par les militants thématiques ?
Pierre Jouvet : Pas seulement, mais en grande partie oui. Il y aura aussi le statut des engagés. Les modes d’engagements ont évolué, avec le développement des réseaux sociaux et parce que les parcours de vie ont changé. Désormais, on s’engage pour des causes à un instant précis. La mobilisation contre l’augmentation du prix des carburants en est un bon exemple.
Trop souvent des sympathisants nous disent : "mais je ne savais pas à qui m’adresser" ou " je croyais qu’il fallait être coopté". Il faut donc plus de souplesse dans nos statuts pour permettre à tous ceux qui le souhaitent de nous rejoindre.
Cap Finistère : Comment envisages-tu ton rôle de porte-parole national ?
Pierre Jouvet : On ne peut pas le nier : le temps de parole du Parti socialiste s’est considérablement réduit depuis les élections présidentielles et législatives. A nous d’être imaginatifs et percutants pour compenser cette perte de temps comptabilisé par le CSA. C’est pour ça que nous allons monter en puissance sur internet et les réseaux sociaux avec une web tv et des vidéos régulières, mais aussi en étant plus présents dans la presse quotidienne régionale.
Mais, comme nous l’évoquions au début de notre entretien, je ne veux pas être un porte parole de punchlines faciles, de petites phrases. On voit trop souvent sur twitter ou facebook des commentaires haineux que personne n’oserait proférer dans la vraie vie. Nous voulons prendre de la hauteur et expliquer de manière originale les positions des socialistes.
Article publié dans le Cap Finistère n°1246 du 9 novembre 2018