Pour des assurances qui assurent
Depuis le début de la crise, on ne compte plus les témoignages de chefs d’entreprises victimes d’une chute brutale de leur chiffre d’affaire, liée au confinement, qui se sont vu refuser une indemnisation par leur assureur. Face à cette situation i n a c c e p t a b l e , l e gouvernement et la majorité ont fini par évoquer enfin des engagements complémentaires des assureurs vis-à-vis de leurs assurés et vis-à-vis du fonds d’aide aux entreprises. « Le gouvernement est attentif à ce que les assureurs soient mobilisés auprès de leurs clients dans les secteurs économiques particulièrement touchés et participent à l’effort de solidarité nationale », s’est contenté d’indiquer Édouard Philippe. « Mais pourquoi attendre des “ engagements ” au bon vouloir des acteurs de l’assurance ? Cela peut se faire tout de suite, par la loi ! », ont estimé les députés socialistes qui ont joint le geste à la parole en déposant une proposition de loi qui poursuit deux objectifs. D’abord, afin de répondre à l’urgence, les députés socialistes et apparentés proposent de créer une contribution exceptionnelle de la part des assureurs, afin de répondre immédiatement aux besoins des entreprises. Il s’agit d’un dispositif unique, simple et propre à la crise en cours. Cette contribution abonderait le fonds d’aide aux entreprises à hauteur de 500 millions d’euros, soit 300 millions euros de plus que ce que les assureurs ont déjà annoncé. Mais, la proposition de loi vise par ailleurs à permettre, dans le futur, à un assuré de faire valoir sa garantie « pertes d’exploitation » en cas d’interruption totale ou partielle d’activité en raison des mesures prises pour endiguer une « catastrophe sanitaire » afin que cette situation inacceptable ne se reproduise pas. En effet, c’est de bonne foi que les entrepreneurs pensaient que la baisse de leur chiffre d’affaire serait prise en charge par leur assurance. La garantie « pertes d’exploitation » actuelle permet à l’entreprise, lorsqu’un sinistre entraîne une interruption de l’activité, de compenser la baisse de son chiffre d’affaires par une indemnité versée par son assureur. Dans le cas d’une catastrophe naturelle, les communes doivent faire une demande de reconnaissance « d’état de catastrophe naturelle » dont la décision revient à l’État par la prise d’un arrêté interministériel. Or le dispositif propre aux catastrophes naturelles ne permet pas l’activation de la garantie « pertes d’exploitation » face à la crise sanitaire actuelle. En effet, la définition de la « catastrophe naturelle » ne prévoit pas le risque épidémique comme risque d’origine naturelle et le recours à une telle déclaration serait donc juridiquement contestable. C’est pourquoi un nouveau régime de catastrophe faisant l’objet d’une clause obligatoire dans les contrats d’assurance doit venir répondre à ce vide juridique afin de permettre, à l’avenir, de couvrir les risques propres aux épidémies.
Article publié dans le Cap Finistère n°1308 du 17 avril 2020