Alors que la question européenne revient sur le devant de la scène, la publication des conclusions de la réflexion citoyenne pour l’avenir de l’Europe, présentées à la date très symbolique du 9 mai, constitue un évènement important : elle démontre qu’une révision des traités devient urgente.
« Après un démarrage difficile, cette innovation démocratique, ayant abouti à 49 propositions et 300 mesures dans tous les champs d’interventions de l’UE, fera date. Pour les rendre concrètes, une révision des traités s’impose » a en effet commenté l’eurodéputée socialiste, Nora Mebarek.
« Mais le vrai succès de la Conférence repose sur un constat implacable : qui osera dorénavant écarter la parole citoyenne du débat européen ? Un pari réussi… et non des moindres ! »
Que dit la conférence sur l’avenir de l’Europe ? Elle avance 49 propositions qui se déclinent en 300 mesures concrètes pour les mettre en œuvre.
Le document rendu public est divisé en 9 chapitres : le changement climatique et l’environnement, la santé, une économie plus forte, la justice sociale et l’emploi, l’Union européenne dans le monde, les valeurs et les droits, l’état de droit et la sécurité, les transformations numériques, la démocratie européenne, les migrations et enfin, l’éducation, la culture, la jeunesse et le sport.
Ces propositions sont le fruit d’une longue réflexion qui vise à renforcer la construction européenne et l’adhésion des citoyens à son projet. Il ressort de ce travail que les Européens ne se satisfont pas de l’UE telle qu’elle fonctionne actuellement. En effet, à travers toutes les propositions avancées, on peut déterminer comme ligne directrice une volonté de démocratiser les institutions européennes et de mieux prendre en compte les aspirations des citoyens. Loin de la carricature des nationalistes eurosceptiques, les citoyens européens veulent franchir un nouveau cap dans l’intégration européenne, persuadés qu’ils sont que, dans un monde de grandes puissances, parfois hostiles aux valeurs de l’UE, seule l’échelle continentale peut permettre aux Européens d’affirmer leur souveraineté et de promouvoir un modèle économique et social et environnemental orignal.
On retrouve cette volonté dans toutes une série de propositions visant à promouvoir l’indépendance de l’UE dans les domaines de l’énergie ou de l’agriculture. Mais aussi, bien sûr, dans le domaine militaire et numérique puisque l’agression de l’Ukraine par la Russie est intervenue pendant les travaux de cette conférence.
Le débat autour de l’efficacité de l’action européenne a notamment conduit la conférence à se prononcer en faveur de la règle de la majorité qualifiée, et non de l’unanimité. Une des propositions consiste à « réexaminer les règles relatives à la prise de décision et au vote des institutions européennes. La question du vote à l’unanimité mérite une attention particulière, car il rend très difficile tout accord. (…) Toutes les décisions actuellement prises à l’unanimité devraient, à l’avenir être prises à la majorité qualifiée. Les seules exceptions devraient être l’admission de nouveaux états membres dans l’union et la modification des principes fondamentaux inscrits à l’article 2 du traité sur l’union européenne et dans la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ».
Pour les eurodéputés socialistes français, les conclusions de cette conférence sont « un encouragement à renouer et amplifier les contacts avec la société civile, à l’image des réunions régulières sous l’égide du "caucus de la famille progressiste". Car à présent il faudra se battre de concert pour que le résultat de cette entreprise ne reste pas lettre morte. » En effet, la détermination et l’enthousiasme des propositions formulées sont loin de faire l’unanimité au sein du parlement européen. Les représentants de la droite conservatrice et de l’extrême-droite sont logiquement contre les avancées proposées. La droite "pro-européenne" quoi qu’elle en dise, reste attachée à une forme de statu quo, et est partagée. Et même les centriste et libéraux, paraissent réticents à porter les propositions sociales et environnementales.
Quel sera donc l’avenir des propositions de la conférence citoyenne ? Le même que celui de la convention citoyenne pour le climat, en France ?
« Emmanuel Macron, qui a pris la parole à Strasbourg en tant que Président du Conseil de l’UE, a soutenu un certain nombre des propositions notamment dans le champ institutionnel (réouverture des traités, droit d’initiative du PE, fin de l’unanimité au Conseil dans les principaux domaines où elle prévaut encore : fiscalité, diplomatie, défense) » ont noté les eurodéputés socialistes.
« Cette "fin" de la Conférence n’est donc en réalité que le début, et il reste bien du travail pour matérialiser toutes les promesses en germe en veillant à ne surtout pas perdre l’élan initial. »
Article publié dans le Cap Finistère n°1394 du 20 mai 2022
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