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mercredi 25 décembre
Pour une agriculture à visage humain
 
Agriculture, alimentation : la Bretagne doit-elle tout changer ? Voilà la question un peu provocante posée par le BREIS pour sa troisième visio-conférence qui s’est déroulée le 4 juillet. Comment offrir une alimentation locale et de qualité aux Bretonnes et aux Bretons, tout en rémunérant correctement agriculteurs et ouvriers de l’agroalimentaire et en n’occasionnant aucun impact sur l’eau ou les sols ? Et le tout en partant d’un modèle productiviste basé sur la production de masse destinée, notamment pour la volaille, à l’export. Voilà l’équation que la Bretagne doit résoudre. Les aspirations des agriculteurs, mais aussi des consommateurs évoluent et contribuent à faire émerger une nouvelle manière de produire mais aussi de consommer. Jean-Marc Thomas, porteparole de la confédération paysanne en Bretagne, a résumé l’ambition de son organisation : permettre au maximum d’agriculteurs d’exploiter des fermes à échelle humaine, en leur garantissant des conditions de vie et de travail décentes, dans un environnement préservé. Pour y parvenir, la régulation des marchés est indispensable, tant au niveau national qu’européen et mondial. Pour préserver la souveraineté alimentaire, il faut mettre fin aux accords de libre échange qui donnent un pouvoir démesuré aux multinationales par rapport aux États. « Le problème, ce ne sont pas les agriculteurs mais le système agroindustriel », a renchérit Marie-Pascale Deleume de la Fédération Bretonne Nature Environnement. « L’évolution des taux de nitrates dans les rivières bretonnes montre d’ailleurs qu’ils ont su faire des efforts puisqu’ils sont passés de 5 à 10 mg par litre, dans les années 60 pour monter à plus de 50, dans les années 90 et qu’il se situe environ à 30 mg aujourd’hui. » La Région Bretagne partage les mêmes ambitions agricoles. Pour Loïg Chesnais-Girard, la politique agricole de la Région doit tenir compte de trois éléments : elle doit d’abord garder sa fonction première qui consiste à nourrir la population avec des aliments de qualité. Elle doit ensuite garantir la préservation de l’environnement. Et enfin, elle doit maintenir les emplois dans la production et la transformation. Pour Loïg Chesnais-Girard, la Région peut intervenir dans au moins trois domaines. D’abord, en soutenant l’installation des jeunes, ce qui implique un discours positif sur le métier d’agriculteur, mais aussi un effort en matière de formation. À cela il faut ajouter, avec les communes et les intercommunalités, un travail sur le foncier et la préservation des terres agricoles de manière à ce que les jeunes puissent s’installer sans être obligés de s’endetter inconsidérément. Tous les intervenants, y compris de la FNSEA, ont regretté l’absence de loi, pourtant promise, sur la préservation du foncier agricole. « Il faut rapidement une loi foncière », a insisté Michaël Quernez qui a illustré son propos en évoquant une expérience de reconquête de friches littorales menée à Moëlan-sur-Mer. 
 
« Les aides à l’hectare n’ont plus aucun sens, c’est la main-d’œuvre qu’il faut rémunérer. » 
 
Ensuite, la Région peut contribuer à la qualité de vie et de travail en accompagnant la modernisation des exploitations et le maintien de fermes à visage humain. Les structures industrielles ne peuvent pas appartenir aux agriculteurs. C’est pourquoi la Région défend le modèle de la polyculture élevage sur des exploitations de taille modeste. Pour les volailles, la capacité de production ne progressera pas. Elle restera aux alentours de 3,2 millions de m2. L’alimentation est un enjeu éminemment politique, a rappelé JeanLuc Fichet qui vient de rendre un rapport parlementaire sur l’alimentation. Il met clairement en évidence que la condition sociale joue un rôle déterminant dans l’accès à une alimentation de qualité. Les comportements alimentaires ont une influence directe sur la santé. Comment parvenir à réorienter durablement le modèle ? La Région y travaille. Mais sur un budget d’un milliard, la part consacrée à l’agriculture ne pèse que 30 millions. « On peut dire que nous disposons d’un cure-dent et d’une pince à épiler », a, sous forme de boutade, résumé Loïg Chesnais-Girard. Mais, sur le territoire de la Bretagne, les subventions de la Politique Agricole Commune (PAC) représentent 500 millions d’euros. D’où la proposition de régionaliser leur gestion et non de la laisser entre les mains de l’État. Pour quoi faire ? Pour mettre en œuvre précisément une politique qui favorise l’emploi et une production de qualité. Cela passe par une meilleure répartition des aides basée non plus sur les surfaces mais sur le nombre de producteurs. Il convient donc de plafonner certaines aides et d’instaurer des planchers de manière à ce que certaines productions, notamment en maraîchage ou en horticulture, qui ne nécessitent pas de grandes surfaces puissent être accompagnées. Les aides à l’hectare n’ont plus aucun sens, c’est la main-d’œuvre qu’il faut rémunérer ainsi que le rôle environnemental que jouent les agriculteurs en entretenant, par exemple, les prairies ou les haies. Il faut retrouver l’esprit des CTE (Contrat Territoriaux d’Exploitation) qu’avait mis en place Louis Le Pensec. Les socialistes bretons défendent une agriculture à visage humain qui réponde à la fois aux attentes des agriculteurs et des consommateurs et qui participe à la transition écologique en produisant plus de légumes et de fruits et une viande de qualité, avec des animaux nourris grâce aux protéines produites ici et non importées des États-Unis ou du Brésil. 
 
Article publié dans le Cap Finistère n°1319 du 10 juillet 2020 
 



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