L’instauration d’un revenu de base ou d’un revenu universel fut l’un des enjeux de la Présidentielle de 2017 et sera encore un des thèmes de celle de 2022. Mais entre-temps, la crise sanitaire et ses conséquences sociales l’ont rendu encore plus urgent.
C’est pour cette raison que les Socialistes des sections de Quimper communauté (Quimper,
Plomelin et Briec) ont organisé, le 11 mars, un webinaire pour présenter les enjeux et surtout en débattre. « Nous avons besoin de bien maîtriser les termes de ce débat », a insisté Jacques Le Roux, en préambule.
En effet, comme l’ont montré les deux intervenants, Nathalie Sarrabezolles, présidente du Conseil départemental, et Sébastien Née, étudiant à Quimper, la question est bien sûr technique, mais surtout politique voire idéologique.
« C’est une bataille culturelle et sémantique que nous devons mener »,
a insisté Nathalie Sarrabezolles. « La droite, avec la notion “ d’assistanat ” est parvenue à faire croire qu’une partie de la population se complairait dans l’inactivité alors que les élus départementaux constatent tous les jours qu’au contraire les demandeurs d’emploi cherchent à travailler. Un revenu de base permettrait de rendre la société plus égalitaire. » Toutes les études montrent que les plus fragiles cumulent les difficultés et subissent une double, voire une triple peine. Il faut arrêter avec l’idée selon laquelle les pauvres devraient toujours se sentir redevables des prestations qu’ils perçoivent.
« Les pauvres n’ont pas à se sentir redevables. »
Ensuite, il convient de clarifier le débat en expliquant ce que la gauche entend par revenu universel. Les libéraux aussi peuvent employer cette expression, en reprenant à leur compte les travaux de Milton Friedmann. Mais pour eux, ce revenu serait accordé pour solde de tous comptes et permettrait à l’État de se désengager de toutes ses politiques sociales et éducatives. « Ce n’est bien sûr pas notre projet et l’attribution d’un revenu universel irait de pair avec un renforcement des politiques éducatives ou d’insertion », a tenu à préciser Nathalie Sarrabezolles. Car les difficultés financières ne représentent qu’un aspect de la précarité dont souffrent notamment les 18 000 allocataires du RSA, dans le Finistère.
Dans une Tribune, publiée dans Le Télégramme, Sébastien Née et un groupe d’étudiants se sont prononcés pour l’attribution, inconditionnelle, d’un revenu de 500 euros pour tous les jeunes Bretons de 17 à 27 ans. « Nous n’avons pas choisi cette tranche d’âge au hasard », a-t-il précisé. Toutes les statistiques démontrent que c’est précisément à cet âge que se concentre la pauvreté. Alors que 2,3 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, ce taux atteint les 15 % chez les 17/27 ans. Selon les associations caritatives, la situation est encore pire qu’après la crise de 2008. C’est encore parmi les 17/27 ans qu’on trouve le plus de jeunes obligés de travailler pour financer leurs études.
Le projet de loi AILES, porté par Boris Vallaud et Hervé Saulignac, aurait pu répondre à la détresse de la jeunesse. Mais la majorité parlementaire l’a rejeté.
Expérimentation
Les Départements, qui exercent les compétences de solidarité, sont quotidiennement confrontés à la précarité et, parfois, à l’inefficacité de certaines mesures.
« Dès l’été 2016, à l’initiative du Conseil départemental de Gironde, une réflexion s’est engagée pour trouver des solutions
à la pauvreté et à la précarité. » L’alternative était simple : soit rester dans une société inégalitaire et tenter d’en atténuer les conséquences, soit la rendre moins inégalitaire. Et, compte tenu de leurs compétences, comment les Départements peuvent améliorer la situation des personnes qu’ils accompagnent ?
De leur expérience en matière de solidarité est née l’idée de tenter une expérimentation d’un revenu de base.
« Il reposerait sur cinq principes », a expliqué la présidente du Conseil départemental. D’abord, la simplification. Il fusionnerait le RSA et la prime d’activité. Il serait accordé dès 18 ans. En effet,
les élus départementaux sont obligés de constater que les jeunes qu’ils accompagnent jusqu’à leur majorité sont, pour la plupart, lorsqu’ils atteignent les 18 ans, livrés à eux-mêmes.
Ce revenu de base serait automatique. Aujourd’hui, on évalue à 30 % le taux de non recours au RSA de la part de personnes qui pourraient être éligibles à ce dispositif.
Le financement de ce revenu de base devrait être garanti. Et il serait inconditionnel.
À plusieurs reprises, les présidents de Conseils départementaux de gauche ont demandé cette expérimentation et ont à chaque fois essuyé un refus de la part du gouvernement. « Alors même que notre projet, qui avoisine les 500 euros, est plutôt modeste », a rappelé Nathalie Sarrabezolles.
Pour justifier ces refus répétés, le gouvernement avance l’argument selon lequel il travaillerait sur un revenu universel d’activité, le fameux RUA. Cependant, pour l’instant, personne ne sait à quoi il pourrait ressembler, ni comment il serait financé.
Article publié dans le Cap Finistère n°1347 du 19 mars 2021
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