Quel équilibre pour la Bretagne ?
De quels outils institutionnels avons-nous besoin pour combattre les inégalités et permettre un développement durable et harmonieux du territoire ? Et comment permettre aux Bretonnes et aux Bretons de participer à l’élaboration des politiques publiques ? Voilà résumés les termes du débat organisé par le BREIS qui s’est tenu le 21 juin en visioconférence. Pourquoi aborder la question maintenant ? D’abord, parce que les enjeux sont colossaux et que les socialistes doivent avoir une vision claire de l’avenir qu’ils veulent inventer pour la Bretagne. Ensuite, parce que le projet de loi 3D peut être prochainement présenté devant le Parlement. Nous devons inventer « la subsidiarité à la française », a résumé Arnaud Platel, secrétaire fédéral en charge du projet. Toujours en pointe sur les questions de décentralisation, les socialistes bretons doivent être une force de propositions. « Une réforme de l’État s’impose. » Ce sont les voies express et les autoroutes qui dessinent la géographie humaine et déterminent où vivent, où travaillent, où consomment et se divertissent les habitants, a expliqué André Crocq. « Mais », insiste André Crocq, « les métropoles sont des lieux de grande diversité qui attirent à la fois les cadres dirigeants mais aussi des publics bien plus précaires. » De plus, aucune métropole de l’Ouest de la France ne peut, seule, rivaliser avec ses homologues européennes ou mondiales. L’union et la coopération entre tous les territoires de l’Ouest est indispensable. Heureusement, les collectivités bretonnes ont une longue habitude de coopération. « Nous devons toujours nous demander si l’échelon d’intervention est le plus pertinent », a insisté Nathalie Sarrabezolles. « Lorsqu’il a été question de supprimer les départements, nous avons mené ce travail. Nous nous sommes demandé, pour chaque politique, quelle autre collectivité pourrait la mener, aussi bien, à notre place ». La commune ? La Communauté de communes ? La Région ? Il est rapidement apparu que l’échelon départemental reste tout de même le plus pertinent en particulier en ce qui concerne l’aide sociale. « L’union et la coopération entre tous les territoires de l’Ouest est indispensable. » L’aménagement du territoire breton reste, par rapport à ce qu’on peut constater dans d’autres régions de France, plutôt harmonieux. Cependant la lutte contre la fracture Est/Ouest est nécessaire pour la Bretagne. Pour le Finistère comme pour l’Ille-et-Vilaine. Car, si on a souvent tendance à considérer le déséquilibre comme un handicap pour les zones qui se désertifient, « il ne faut pas oublier que la concentration engendre aussi des inconvénients », a souligné Nathalie Sarrabezolles qui a insisté sur la responsabilité de l’État. Que veut faire le gouvernement ? Pour l’instant c’est le flou qui domine. On ne sait pas encore ce que contiendra le projet de loi 3D (Décentralisation, Déconcentration et Différenciation). Mais la gestion de la crise du Covid-19 montre à l’évidence qu’une réforme de l’État s’impose, a indiqué le député du Morbihan, Paul Molac. « On a vu, en particulier avec l’épisode des masques, que l’État a du mal à être réactif et agile ». Cependant, si tout le monde sent bien qu’il va se passer quelque chose sur le plan de la décentralisation, personne ne connaît encore le projet qui sera proposé. L’administration centrale laissera-t-elle les collectivités prendre plus d’autonomie ? Les collectivités obtiendront-elles enfin plus d’autonomie fiscale ? « Pour la Bretagne deux questions restent en suspens », a indiqué Paul Molac : la Bretagne à cinq départements et l’assemblée unique figureront-elles dans le projet de loi ? En un mot : la montagne va-t-elle accoucher d’une souris ? Pour Nathalie Sarrabezolles, la question des moyens dont disposent les collectivités reste centrale. Compte tenu de l’inégalité entre les territoires, ils doivent être répartis en fonction des besoins, sans quoi, les différences persisteront et se renforceront. « C’est la raison pour laquelle les départements de gauche propose l’expérimentation du revenu de base. » Il paraît difficile de faire l’impasse sur la question démocratique et de ne pas faire élire, directement ses dirigeants. Mais, dès que les conseillers communautaires seront élus au suffrage universel, quelle légitimité restera aux communes, en particulier les plus petites ? Sans attendre le texte du gouvernement, les socialistes bretons préparent leur projet pour un nouvel acte de la décentralisation. Le prochain débat du BREIS, toujours en visioconférence, se tiendra le 4 ou le 5 juillet et portera sur le modèle agricole breton.
Article publié dans le Cap Finistère n°1317 du 26 juin 2020