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mercredi 25 décembre
Régionaliser la santé

Il faut régionaliser le système de santé et s’inspirer du concours de la médecine militaire pour élargir le recrutement des étudiants, nous explique Daniel Le Bras, médecin anesthésiste réanimateur qui a été responsable des urgences et maire de Quimperlé. 

 

Cap Finistère : Te retrouves-tu dans les propositions du PS pour la santé ?

Daniel Le Bras : Oui, dans l’ensemble je trouve ces propositions pertinentes. Mais j’ai quelques précisions à apporter ou des propositions à soumettre. Et d’abord, sur la forme : je trouve dommage qu’il faille obligatoirement passer par internet pour enrichir le texte. Je crains qu’on ne se prive d’une partie des adhérents qui ne sont pas habitués à utiliser l’outil numérique. 

Cap Finistère : Pour lutter contre les déserts médicaux, tu proposes d’intervenir dès le début des études de médecine.
Daniel Le Bras : Oui, ça fait des années qu’on cherche des solutions pour lutter contre les déserts médicaux. Il faut tout de même rappeler que l’Ordre des médecins porte une lourde responsabilité dans ce phénomène. En effet, en faisant tout pour limiter le nombre de praticiens et ainsi éviter la concurrence, il a créé les conditions de ces déserts. 

La proposition du PS de faire embaucher 1 000 médecins par les collectivités locales est louable mais s’avèrera, je le crains, insuffisante. En effet, cela ne représente que dix praticiens par département. Pour ma part, je pense qu’il faudrait s’inspirer du système de la médecine militaire.

Il ne sera pas possible d’imposer à des médecins diplômés de s’installer dans des territoires où ils ne voudront pas aller. C’est donc dès l’entrée en fac de médecine qu’il faut intervenir. Aujourd’hui, les études coûtent très cher et seuls les enfants de milieu aisé peuvent y accéder car, pour réussir les concours, il faut pouvoir se payer des cours particuliers. Les enfants de milieux modestes ne peuvent pas se le permettre. Lorsque j’étais étudiant, il y avait encore des fils et des filles d’ouvriers et d’agriculteurs en fac de médecine. Plus maintenant. Je propose donc, comme pour la médecine militaire, de rémunérer les étudiants issus de milieux modestes et de zones sous-dotées en médecins, pendant leurs études. En contrepartie, ils devront, pendant une période qui reste à définir, s’installer dans ces zones qu’ils connaissent déjà puisqu’ils en sont issus. Nous sommes face à un cercle vicieux : il n’y a jamais eu autant de médecins mais ils se concentrent dans 

les centres-villes. Donc, les généralistes se retrouvent seuls dans des zones rurales et, parce que tout repose sur eux, s’en vont.
Les maires qui cherchent à attirer un généraliste se trompent. Ce sont des maisons médicales, avec au moins quatre ou cinq professionnels, qu’il faut mettre en place afin qu’ils puissent travailler dans de bonnes conditions et se former. Et l’échelon régional est le plus pertinent. 

Le médecin libéral de campagne, disponible 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, tel qu’on le connaissait auparavant, n’existe plus. Ce n’est plus la réalité de la profession, 56 % des médecins exercent encore en libéral, mais 44% sont salariés. 

Cap Finistère : Tu as été maire et responsable des urgences à Quimperlé. Que penses-tu des propositions pour la gouvernance des hôpitaux ?
Daniel Le Bras : Je pense qu’elles devraient être plus précises. Pour ma part, je souhaite qu’on revienne à de vrais conseils d’administration où siégeraient élus, médecins, syndicats, représentants des patients afin que tous les points de vue puissent être pris en compte. 

Cap Finistère : Toutes les leçons de la crise de la Covid ont-elles été tirées ?
Daniel Le Bras : En partie oui, mais il me semble que cette crise a surtout révélé l’inutilité des ARS (Agences Régionales de Santé) qui ne sont pas équipées pour répondre à une crise de cette ampleur. Il aurait fallu s’appuyer sur la sécurité sociale pour organiser la vaccination. C’est elle qui dispose des fichiers des patients, qui connaît leurs pathologies et donc qui peut déterminer qui doit être vacciné en priorité. Les directeurs des ARS sont des super préfets de la santé qui dépendent du ministère. Pour moi, il faut confier le pilotage de la santé à un binôme composé du préfet de Région et du président du Conseil régional. 

Contrairement à nos voisins, et notamment l’Allemagne, nous n’avons pas préparé le personnel à affronter des crises sanitaires de grande ampleur. 

Dernier élément, il me semble qu’il manque, dans les propositions du PS, un volet solidarité internationale. Des ONG, ou l’armée interviennent en cas de crises majeures, mais il manque un service de santé public qui puisse aider les pays qui peuvent avoir besoin de nos équipements ou de nos compétences. 

 

Article publié dans le Cap Finistère n°1347 du 19 mars 2021

 




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