S’il suffisait d’interdire aux géants du e-commerce de construire des entrepôts pour sauver les magasins de proximité et ainsi préserver l’attraction des centre-villes, il y a longtemps que les maires auraient pris des dispositions en ce sens. La crise que traverse les commerces de centre-ville, depuis déjà de longues années, n’a pas pour origine le développement d’Amazon.
L’entreprise de Jeff Bezos poursuit plusieurs projets de constructions d’entrepôts dans l’Ouest et, en particulier,
à Briec. En même temps, l’ensemble des collectivités socialistes cherchent à soutenir la consommation locale par des campagnes de communication, la distribution de bons d’achats ou des aides pour le développement du numérique. Le BREIS a donc choisi de consacrer une matinée de réflexion afin de trouver des solutions pour éviter que les multinationales ne s’accaparent l’ensemble du commerce mondial.
Guillaume Garot, député de Laval, Olivier Galiana, délégué au développement urbain à La Poste, et Floran Vadillo, vice-président à l’attractivité commerciale et à l’action cœur de ville de grand Périgueux, ont échangé sur un dossier particulièrement complexe avec en toile de fonds, au-delà des questions techniques, une interrogation fondamentale sur le rôle et l’influence du politique lorsqu’il faut réguler et organiser un marché totalement mondialisé.
Pour Guillaume Garot, la bataille engagée entre les géants du e-commerce, et en particulier Amazon, et les commerces de centre-ville ne se livre pas à armes égales. À la question, « Faut-il résister au modèle Amazon ? » le député de Laval répond clairement « oui », en précisant tout de même que cette résistance doit s’accompagner de propositions alternatives, encore en cours d’élaboration.
Pourquoi la concurrence est-elle déloyale ? D’abord, parce que les entrepôts des plateformes ne sont pas soumis aux mêmes règles, d’urbanisme ou fiscales, que les enseignes commerciales.
Ensuite, parce que le climat social au sein de l’entreprise n’est pas bon. Et que toutes les études montrent que le développement du e-commerce provoque des pertes d’emplois dans le commerce de proximité. La plupart des études montrent qu’une création d’emploi dans la logistique provoque deux suppressions dans le commerce classique.
En outre, comme l’ont dénoncé plus de 120 représentants d’ONG, d’associations, de syndicats ou de partis politiques dans une Tribune, « ce développement accéléré se fait aux dépens des engagementsclimatiquesde notre pays. En permettant de tout acheter “en un clic”, Amazon favorise en réalité la multiplication d’achats superflus et suremballés, consommateurs de ressources et émetteurs de CO2 ».
C’est pourquoi, Guillaume Garot appelle à un moratoire sur les constructions d’entrepôts d’Amazon, de manière à pouvoir prendre le temps d’engager un débat sur les attentes des consommateurs, mais aussi sur les règles à imposer à tous les acteurs du e-commerce de manière à ce que la concurrence soit plus loyale.
Car, le e-commerce est, quoi qu’on en pense, appelé à se développer a, chiffres à l’appui, démontré Olivier Galiana. En 2019, ce secteur représentait 2 000 milliards de dollars avec un taux de croissance de 11%. Avec 636 milliards de dollars et une progression de 14 %, l’Europe est la troisième zone du monde, après la Chine et les États-Unis. Mais avec 61 % de la population qui utilise internet, notre continent est le plus connecté.
Aujourd’hui, les critiques se focalisent sur Amazon qui paie sans doute sa place de numéro 1 mondial et sa politique de développement en France. Mais, sur un marché en pleine expansion, d’autres acteurs contestent son leadership comme Ali express, notamment. « Cette entreprise chinoise est encore peu présente en France, mais elle commence à s’implanter et ses délais de livraisons vont rapidement baisser », précise Olivier Galiana. « Si la FNAC avait été le leader, je ne suis pas sûr que notre discours anti e-commerce aurait été si virulent », a ironiquement glissé Floran Vadillo, qui appelle aussi les commerçants et les consommateurs à faire preuve de responsabilités. Les premiers en fidélisant leur clientèle, en s’adaptant à leurs attentes et donc en investissant dans les outils numériques. Les seconds en cessant d’être schizophrènes et en consommant local.
Le e-commerce va se développer. Il revient aux élu.es de se mobiliser pour expliquer les enjeux et trouver des solutions pour organiser et réguler cette activité de manière à éviter que quelques multinationales ne s’accaparent pas cette activité au détriment de tous les autres acteurs du commerce.
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