La sécurité est l’affaire de toutes et de tous. Forte de cette conviction, qui fonde en partie son engagement, Isabelle Assih a lancé le 8 octobre les premières assises de la sécurité locale à Quimper. « C’était un engagement de campagne » a-t-elle rappelé.
Pour la maire de Quimper, les politiques de sécurité doivent être co-construites avec l’ensemble des acteurs concernés : la collectivité et les forces de sécurité bien sûr, mais aussi des partenaires comme les associations, l’éducation nationale ou les commerçants.
L’action de tous ces partenaires doit être éclairée par les travaux des universitaires, sociologues ou historiens qui peuvent expliquer et apporter du recul nécessaire car il n’est jamais efficace de prendre des décisions sous le coup de l’émotion.
Pour mettre en place cette co-construction, il convient d’abord de se mettre d’accord sur un diagnostic partagé. C’est pourquoi la ville de Quimper a fait réaliser une enquête pour connaitre le sentiment des habitants sur la sécurité. Plus de 1000 personnes ont répondu à un questionnaire, en ligne et sur papier. Les acteurs se terrain ont également été sollicité et des rencontres de groupes ont été organisées.
Cette enquête a confirmé des éléments déjà connus. Pour 8O % des personnes interrogées, Quimper est « une ville agréable à vivre ». Cependant, elles considèrent que la situation se dégrade. Le sentiment d’insécurité est le plus fort parmi les femmes entre 14 et 39 ans. Les lieux et les moments où les agressions peuvent être commises ont également été détectés : plutôt la nuit ou pendant des festivités, aux alentours de la gare ou des Halles.
Il est toujours difficile de mesurer le sentiment d’insécurité. L’enquête de victimation qui a été menée montre que seules 50% des personnes victimes d’agressions portent plainte. Par conséquent les statistiques officielles ne reflètent que partiellement le niveau d’insécurité. Parmi les raisons invoquées, les personnes interrogées considèrent qu’elles seraient sans effet, ou que la Police n’y peut rien.
Parmi les causes de l’insécurité, les personnes interrogées citent le trafic de stupéfiants (33%), l’ivresse publique (32%) et l’insécurité routière (25%).
Les addictions sont par conséquent à la base de phénomènes violents a rappelé Nicolas Prisse, président de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives. (MILDECA). Qu’il s’agisse des drogues et de leur trafic mais aussi de l’alcool : 30 à 40% des crimes sont commis sous l’influence de l’alcool.
Il n’est pas facile de lutter contre les addictions. Qu’il s’agisse du tabac, de l’alcool ou des drogues, mais aussi d’internet, de puissants lobbies veillent à préserver « leurs parts de marché ».
Pourtant, à force d’informations et de pédagogie, il est possible de mener des actions de prévention efficaces, en particulier vis-à-vis des jeunes lorsqu’on travaille sur l’estime de soi, le développement du sens critique ou la capacité à s’affirmer.
« Mais nous avons tous une part de responsabilité » a insisté Nicolas Prisse. « En tant que parents, on ne doit pas banaliser la consommation d’alcool, ou en tant que commerçants, on ne doit pas servir une personne ivre, ou vendre du tabac aux mineurs, par exemple. »
Ces premières assises ont permis de mieux comprendre les enjeux liés à la délinquance.
S’il faut considérer les consommateurs de drogues comme des victimes d’addictions qu’il faut soigner, il faut aussi porter un regard lucide sur les revendeurs, qui, depuis quelques années se sont professionnalisés. Les éducateurs de rues, au contact quotidien des toxicomanes savent de quoi les dealeurs sont capables pour « fidéliser » leur clientèle. Les points de deal peuvent être visibles et engendrer des occupations de l’espace public mais le trafic s’ubérise et de plus en plus souvent, les dealeurs livrent leurs clients.
Comprendre, c’est aussi étudier les processus qui conduisent des personnes à basculer dans la délinquance. On peut considérer l’emprisonnement comme la sanction la plus exemplaire. Et pour la grande majorité des citoyens, elle l’est certainement. Mais pour une partie de jeunes, le passage par la prison est presque un passage obligé, une sorte d’étape indispensable dans le « cursus honorum ».
L’insécurité sur la voie publique doit naturellement être combattue. Cependant, d’autres formes d’insécurités, intrafamiliales ou scolaires, doivent aussi retenir toute l’attention de la collectivité, qui doit soutenir les dispositifs mis en place par l’éducation nationale pour prévenir, repérer et accompagner les victimes de harcèlement scolaire.
Qui dit co-construction dit, naturellement, évaluation. « Il y aura, en 2023, une deuxième édition des assises de la sécurité » a annoncé Isabelle Assih. D’une part pour vérifier l’efficacité des actions engagées, mais aussi pour faire le point sur les tendances de la délinquance, qui a, malheureusement toujours un coup d’avance, sur la Police et la Justice. Reste donc aux acteurs de la sécurité à coopérer, à échanger afin de devenir suffisamment agiles, pour répondre voire anticiper les nouvelles formes de délinquances.
Article publié dans le Cap Finistère n°1408 du 14 octobre 2022
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