Le 11 avril, dix-neuf président.es de Conseils départementaux ont publié dans « Le journal du dimanche » une Tribune pour demander au gouvernement de « mettre en œuvre un revenu de base sans contrepartie » (voir encadré).Dans une émission « À l’air libre » de Médiapart sur internet, le 17 avril, Nathalie Sarrabezolles est revenue sur cette Tribune pour expliquer les enjeux du revenu de base.« Les départements, de par leurs compétences dans le quotidien de la vie des Françaises et des Français, travaillent déjà depuis plusieurs années sur ce revenu de base »,a d’emblée précisé la présidente du Conseil départemental.« Mais nous voudrions être plus efficaces et faire rebasculer les questions de solidarité dans le champ de l’investissement social, plutôt que dans celui du curatif qui atteint vite ses limites. Nous avons imaginé un dispositif que nous avons proposé au gouvernement, qui permettrait à la fois de revenir sur les questions d’équité et qui serait scientifiquement crédible puisqu’il s’appuie sur des études. Ces propositions permettent d’avancer vers un dispositif, financièrement soutenable, qui peut se mettre en place rapidement. »Le confinement, avec toutes ses répercussions sociales, apparaît, pour les président.es de Conseils départementaux, comme l’occasion de remettre la question de la solidarité au cœur.« Solidarité et réciprocité », précise Nathalie Sarrabezolles, car si tous les membres d’une société ne peuvent pas y participer c’est un manque de ressources pour la société toute entière. C’est comme ça qu’il faut envisager un dispositif qui doit être facile d’accès afin d’éviter le non-recours. En effet, on a parfois l’impression que des dispositifs sociaux sont mis en place et qu’immédiatement on essaye de limiter le nombre de bénéficiaires. « Là, l’idée c’est que ce soit facile, automatique, que ça permette à chacun d’avoir au moins un revenu qui lui permette de vivre décemment ».Il est encore possible de débattre du montant du revenu de base. Les études montrent que globalement, pour une vie sans sacrifice majeur, on doit pouvoir disposer d’environ 1 500 euros. Le revenu de base s’inscrit dans une démarche bien plus globale. « On n’est pas dans le revenu universel à la Friedmann »,a tenu à préciser la présidente du Conseil départemental. « Nous sommes vraiment dans une démarche collective. Ça ne peut fonctionner que si en plus nous avons des politiques fortes en matière d’éducation, de formation, d’accompagnement des familles. »« Si nous attendons à chaque fois d’avoir des réponses à tout, avant d’avancer, alors nous ne ferons rien. »« Et pour nous il faut aussi inclure les plus jeunes qui pour l’instant sont exclus de tous ces dispositifs d’appui », insiste Nathalie Sarrabezolles. « À partir de 18 ans de nombreux jeunes se retrouvent un peu seuls et nous devons pouvoir les accompagner aussi. »C’est donc un dispositif à plusieurs étages qui doit permettre que chaque personne puisse construire son projet de vie avec ses propres ressources et les développer.
« Si nous attendons à chaque fois d’avoir des réponses à tout, avant d’avancer, alors nous ne ferons rien. »
On ne peut pas être dans le « tout ou rien ». La question de la précarité se pose évidemment : n’y a-t-il pas un risque de voir se développer encore plus les « bad jobs » ? C’est possible. Mais a contrario, ce revenu de base ne peut-il pas rééquilibrer le rapport de force entre employeurs et salariés qui, justement parce qu’ils disposeront de ce revenu, ne seront pas obligés d’accepter des conditions de travail inacceptables ?Le projet des signataires de la Tribune consiste à mettre en place un revenu de base tout en continuant à travailler globalement sur des réponses collectives et sociales beaucoup plus larges. Dans cette période de crise le gouvernement est sans doute plus à même d’être à l’écoute. « Nous, nous avons cette proposition depuis un moment, donc c’est l’occasion de le faire partager d’autant qu’il y a une forte demande sociale. »
Article publié dans le Cap Finistère n°1310 du 30 avril 2020
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