Usagers : comment se faire entendre ?
Quelle est la place des usagers dans notre système de santé ? Pour le savoir nous avons interrogé Chantal Guittet. L’ancienne députée de la 5e circonscription du Finistère, membre du conseil d’administration de France Assos santé Bretagne, siège actuellement à la commission des usagers du CHRU de Brest
Cap Finistère : Que prévoit la loi en matière de représentation des usagers ?
Chantal Guittet : Dans les années 80 et 90 suite à plusieurs scandales sanitaires, la participation des usagers est devenue indispensable. Une ordonnance de 1996 a prévu la présence de représentants des usagers dans les conseils d’administration des établissements publics de santé. A la suite des états généraux de la santé, la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé a permis d’élargir leur présence au sein d’autres instances. Pour ma part, je siège à la commission des usagers (CDU) au titre de « Que Choisir ». Pour être désigné par l’ARS (Agence régionale de santé) il faut être membre d’une association agréee par le ministère de la santé. Une fois désignés, nous suivons une formation sur les droits des patients et sur la démocratie sanitaire. La durée de notre mandat est de trois ans.
Cap Finistère : Quel est le rôle de cette CDU ?
Chantal Guittet : Elle est composée de représentants de l’administration, de médecins et donc de représentants d’usagers. Elle doit se réunir au moins quatre fois par an et elle est chargée d’étudier toutes les plaintes des patients. Certaines sont tout à fait légitimes, d’autres le sont beaucoup moins. Toutes les plaintes sont étudiées. Le plus souvent elles donnent lieu à des médiations. Les médecins expliquent aux patients ou à leurs familles pourquoi telle ou telle décision a été prise. Il peut arriver que la commission conseille de saisir la justice mais en général la médiation suffit. Les services sont toujours informés de manière à pouvoir adapter leur fonctionnement et ainsi ne pas renouveler les erreurs.
Nous sommes sollicités pour siéger dans les commissions de gestion des risques ou de qualité ou dans celle des activités libérales au sein de l’établissement.
Cap Finistère : La multiplication du nombre d’associations de malades n’est-elle pas obstacle à la représentation des usagers ?
Chantal Guittet : Non, je ne le crois pas. Nous ne jouons pas du tout le même rôle. Ces associations de malades n’ont pas vocation à entrer dans le dispositif institutionnel. Elles sont là pour soutenir, aider et conseiller les malades et leurs familles. Nous, nous devons faire en sorte que les droits de tous les patients soient toujours appliqués et que la démocratie sanitaire soit respectée. C’est ainsi que nous sommes particulièrement vigilants à ce que l’intimité des patients soient bien préservée et que, par exemple, personne ne puisse entrer dans les chambres pour proposer des services.
Nous nous faisons aussi le relais de personnes en situation de handicap qui peuvent rencontrer des difficultés pour accéder à l’hôpital. Ainsi, alors que des travaux sont en cours à la Cavale Blanche, nous avons alerté la direction à propos de personnes en fauteuil roulant qui rencontraient de grandes difficultés pour se rendre dans certains services. De la même manière, nous avons attiré l’attention de l’administration sur les problèmes que rencontrent les personnes mal entendantes lorsqu’elles doivent communiquer avec quelqu’un qui porte un masque. Et nous avons également proposé des améliorations, en matière de signalétique pour les personnes malvoyantes.
Cap Finistère : Que faire pour améliorer la représentation des usagers ?
Chantal Guittet : D’abord, il faudrait revoir la composition des commissions des usagers. Quelle que soit la taille de l’établissement, elles ne sont composées que de quatre représentants des usagers, deux titulaires et deux suppléants. Or, si je ne prends que l’exemple de Brest, le CHRU est implanté sur 7 sites. Il faudrait donc tenir compte à la fois du nombre de lits, mais aussi du nombre de sites.
Dans Certains établissements les usagers ne sont pas représentés, faute de volontaires ce qui est regrettable. Cette fonction n’est pas assez connue du grand public.
Ensuite, on constate que la prise ne compte de nos avis ou recommandations dépend de la bonne volonté de chaque établissement. Certains sont en pointe sur la démocratie sanitaire, d’autres, le sont moins.
Enfin, il est urgent de faire savoir aux patients qu’ils sont représentés. Il faudrait que les commissions disposent systématiquement de plus de moyens pour pouvoir correctement être le porte-parole des usagers. Par exemple que nous soyons clairement visibles sur le site internet des établissements ou encore qu’à l’entrée des établissements un affichage annonce qui nous sommes et comment nous contacter
Souvent nous nous heurtons à l’inertie de l’administration. Nous avons besoin de vos avis, vous pouvez nous contacter par
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Article publié dans le Cap Finistère n°1316 du 19 juin 2020