Ya d’ar brezhoneg !
Non seulement le développement de la langue bretonne ne constitue pas un frein au développement économique, mais en plus il est un facteur de cohésion et d’affirmation de la culture bretonne. C’est la conclusion de la conférence organisée le 21 septembre par Arnaud Platel, secrétaire fédéral au projet, à Quimperlé.
Tour à tour, Malo Bouessell du Bourg, Léna Louarn, Paul Molac et Bernez Rouz ont mis en évidence l’importance de la défense et de la promotion des langues régionales. Mais surtout l’urgence à agir.
Pour Malo Bouessell du Bourg, directeur de Produit en Bretagne, le Breton constitue un atout. D’ailleurs l’association, qui regroupe près de 400 entreprises, a placé le développement de la langue bretonne parmi ses objectifs. Il y a une cinquantaine d’années, les commerciaux des firmes agroalimentaires se devaient presque de parler Breton lorsqu’ils sillonnaient les campagnes. Aujourd’hui, ce n’est plus nécessaire. Mais, ça apporte une valeur ajoutée.
Les langues ont différentes fonctions au sein des entreprises. Le Français paraît incontournable. Tout comme l’Anglais lorsqu’on travaille à l’International. En revanche, le Breton apporte une vraie valeur ajoutée car il permet de renforcer la cohésion de l’équipe tout en donnant la possibilité à l’entreprise de se différencier de ses concurrents. « Le Breton est un facteur d’attractivité pour les entreprises qui l’utilisent sur leurs étiquettes », a insisté le directeur de Produit en Bretagne, prenant comme exemple des produits agroalimentaires vendus à l’export.
Aujourd’hui, environ 225 000 personnes parlent Breton. Compte tenu de la démographie, le nombre de locuteurs a tendance à baisser naturellement sans que les nouveaux locuteurs les remplacent totalement. D’où l’importance de l’enseignement le plus tôt possible dans les filières immersives ou bilingues. « Environ 30 % des Bretons auraient souhaité parler Breton », a rappelé Léna Louarn, vice-présidente du Conseil régional et présidente de l’Office de la langue bretonne.
« Il faut neuf mois pour apprendre à parler Breton », a-t-elle précisé. C’est donc un peu une course contre la montre qui est engagée pour développer l’enseignement du Breton. Le Conseil régional a bien pris la mesure de cette urgence puisque le budget qu’il consacre à la promotion des langues de Bretagne est passé de 2,1 millions d’euros en 2005 à 7,5 millions d’euros en 2019.
L’ i d e n t i t é bretonne est originale, a rappelé Bernez Rouz, président du Conseil culturel de Bretagne. Notre région est la seule à s’être dotée de ce type de structure en 2009.
L’usage du Breton n’a pas toujours été vu d’un bon oeil. De la Révolution française à la IIIe République, on peut parler, en s’inspirant des travaux de l’universitaire Michel Denis, de l’identité niée.
Il fallut attendre la fin de la guerre pour passer à la période de l’identité revendiquée. Mais aujourd’hui, nous sommes dans la période de l’identité créative. Pour le Conseil culturel de Bretagne, il est essentiel que chacun, où qu’il vive, ait accès à la culture et à l’apprentissage du Breton.
Nous ne pouvons compter que sur nous-mêmes, a insisté Paul Molac, député du Morbihan. L’un des freins au développement du Breton vient des Bretons eux-mêmes qui, francophones de naissance ne se sentent pas légitimes pour parler Breton. Pourtant, la langue est essentielle à la culture bretonne. Et les solutions pour la développer sont bien connues. Elles reposent sur le tryptique : éducation, signalisation, médias. Mais, a rappelé le député du Morbihan, la haute fonction publique, en particulier au sein du ministère de l’Éducation, compte de farouches opposants au développement des langues régionales.
Que retenir de ce débat ? D’abord que plus personne n’a peur des langues régionales. Elles ne menacent ni la République, ni l’unité de la France et elles ne peuvent pas être considérées comme des concurrentes pour la langue française. Elles ne peuvent pas non plus être considérées comme un frein au développement économique. Au contraire.
Tout le monde s’accorde à défendre et à valoriser les langues de Bretagne. Mais, quelles que soient les mesures qui pourront être prises, elles ne peuvent venir que d’ici, de Bretagne. Et par conséquent, le Conseil régional de Bretagne est en première ligne pour impulser la dynamique. Même si les autres collectivités ont un rôle important à jouer en accompagnement.
Article publié dans le Cap Finistère n°1283 du 4 octobre 2019